mercredi 16 janvier 2013

Extrait de June 3

En petit cadeau de nouvelle année, Manon Fargetton nous offre un extrait de June 3 que j'attends avec impatience de découvrir...
Voici pour vous:




"Je marche vers le gaillard d'arrière de l'Albatros. Fermement campé derrière la roue du gouvernail, le capitaine Kenneth Anderson me regarde approcher. La petite lampe tempête suspendue près de lui dispense un halo de lumière accueillant qui accentue la blondeur de ses cheveux et de sa courte barbe. 

— J'ai dormi longtemps ?
— Une nuit et un jour. Nous avons quitté les tours il y a un peu plus de trente heures.
Je hoche la tête. Les yeux délavés de Kenneth sont profondément cernés, son visage plus émacié que jamais, et sa chemise blanche bouffante sort négligemment de son pantalon. Il n'a pas dû quitter la barre depuis tout ce temps. Le tutoiement me vient naturellement.
— Quelle direction as-tu prise ?
Kenneth ne semble pas gêné par ma familiarité.
— Plein ouest. 
Je prends note de l'information en silence. 
Plein ouest. 
Droit vers La Ville et le Port de la Lune. 
Droit vers mon passé. 
Droit vers la troisième Source. 
Lorsque j'ai quitté ces lieux, les Oldariss déferlaient chaque jour sur La Ville. Je crains de découvrir ce qui m'attends là-bas.
— As-tu vu des Oldariss ? 
Kenneth secoue la tête.
— Elles ont fui lorsque la deuxième Source s'est remise en marche. 
Je frissonne. Elles ont fui, oui, mais les survivantes ne sont pas loin. Je les sens quelque part devant nous, regroupées en une masse confuse. 
— Tu devrais regarder derrière, dit Kenneth.
— Derrière quoi ?
D'un geste du pouce, il m'indique la rambarde à l'arrière du navire. Je me penche par dessus le garde-corps. Mes yeux accrochent une luminescence jaune-verte autour des lettres peintes qui forment le nom du bateau sur la coque. Intriguée, je me penche un peu plus. Un léger bourdonnement me parvient. Les petits points lumineux entament une danse lente dans le silence nocturne. Bii étire son cou par dessus mon épaule pour regarder à son tour. Elle se met immédiatement à pousser des petits couinements joyeux. Mes sourcils s'arquent d'étonnement. Je murmure :
— Les lucioles !
— Elle t'ont suivies, fait Kenneth avec un sourire enfantin.
Et ce sourire se pose sur moi avec la douceur d'une caresse. Sans que je sache m'expliquer pourquoi, la présence des lucioles qui nous ont guidées dans les tours me fait du bien. Comme si la lumière ne m'avait pas complètement abandonnée.
— Merci.
— Retourne te coucher, me répond Kenneth. Le jour ne se lèvera pas avant trois bonnes heures.
— J'ai suffisamment dormi.
— Dors tant que tu peux. Qui sait ce qui nous attend à présent.
Je hausse les épaules, me ralliant à sa logique tout en doutant de pouvoir retrouver le sommeil."




Source, page facebook de Manon Fargetton, ICI

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